[QL : Un Foyer pour une Orpheline] 4- Douce Sérade - Maison de Dexert

Jimz m'a permis de choisir une maison à louer. Difficile choix que j'ai eu à faire. Habituellement, on ne choisit pas, on prend ce qu'il y a avant que quelqu'un d'autre ne le prenne. En plus, une maison ! Avec plusieurs chambres, une salle de bain, un bureau, une grande cuisine. La vie de bourgeois à portée de main.

Le choix fût difficile mais fût fait. Une haute demeure avec un petit jardin dans lequel je pourrais planter de nombreuses plantes m'inspira. Cette batisse qui paraissait d'une solidité intemporelle s'étendait sur deux étages et un grenier. Cuisine et salle de reception au rez de chaussé ; deux chambres plus salle d'eau au premier et enfin, chambre plus annexe au deuxième.

La sécurité fût mon principal critère de sélection, cette maison avait garder deux jeux de clés pendant des années sur une table dans la salle du rez de chaussée. Ensuite le jardin, je me vois très bien dans celui-ci : le coin potager, le coin fleurs, le coin aromates et le coin caché derrière les buissons qui me permettra d'installer mes plantes pour mes petites potions particulières. Caché au cas où quelqu'un saurait reconnaître les plantes qui endorment, réveillent ou font perdre la tête.

L'emmenagement fût très rapide, j'avais emmener peu avec moi. Par contre le ménage et les réparations fûrent longues, très longues avant que la maison puisse être présentable.

Je devais trouver un nom pour cette ... non, pour ma première maison. Un mot qui me représente, qui exprime ce que je ressent et qui pourrait paser inaperçu si un voisin me demandait d'où vient ce nom. Ce mot me vient à l'esprit tout de suite : La douce sérade.

On frappe à la porte. Je tourne la clé et elle s'ouvre sur un jeune garçon d'environ douze ou treize ans. Il a l'air nerveux et ne sait pas trop où se mettre. En le regardant, on donnerrai tout ce qu'il veut à ce tête d'ange mais parfois, dans son regard, on peut y discerner une lueur de colère enfouie et une rage démesurée. C'est ce qu'il m'a plut chez lui.

- Ah, te voila. Merci. Comment t'appelles tu ? Lui demandais-je en lui tendant la main.

Il la regarda et la prit avec méfiance.

- Marat, m'dame. Qu'est ce que je peux faire pour vous ?

- Eh bien enchantée, Marat. Je suis Dexert, la cuisinière.

- Je sais qui vous êtes.

Ca va pas être facile.

- Bien. J'ai appris par ton père qu'il était éleveur de cochons avant de venir ici et que tu aimais beaucoup l'aider dans cette tâche.

- Oui, et ?

- J'aimerai que tu t'occupes de mes deux porcelets. Les nourrir, les faire grandir et se reproduire.

- Deux c'est pas assez pour se reproduire. Les bébés vont être bizarres au bout de trois ou quatree portées.

- C'est tout à fait juste mais j'espère dans un avenir proche en avoir d'autres. Tu seras rétribué pour ce travail bien entendu. Tu as des questions ?

- Où devrais-je les garder ?

- Je t'avoue que je ne sais pas trop, si tu as une idée ?

- Je vais réfléchir à votre proposition. Vous voulez une réponse pour quand ?

- Avant la fin de la semaine, je commence à ne plus avoir trop le temps de m'occuper d'eux.

- Ok, ça sera fait, je reviendrais après demain.

- Très bien merci Marat.

Après une poignée de main, il sorti. Je l'ai regardé rentrer chez lui. C'est bien ce que je pensais, il est intelligent ce gosse. Il pourrait très bien faire l'affaire.

Le lendemain soir, à la même heure, on frappa. Marat entra dès la porte ouverte, fit comme chez lui et s'installa dans le salon.

- As-tu réfléchit ? Lui ai-je demandé.

- J'accepte de garder les deux cochons et ceux qui vont arriver. Pour les garder, j'ai cherché hier et y'a un terrain pas loin qui serait parfait. Y'a déjà tout ce qu'il faut, une mangeoire, une baignoire pour l'eau, une patogeoire, etc. Par contre pour la nourriture, on fera comment ?

- Ca ne t'inquiète pas, je ramènerai de la cuisine plein de restes, il ne mourreront pas de faim.

- Sinon pour le salaire, il faudrait voir avec mon père, il pensait que nous donner à manger tout les jours serait bien.

- Pourquoi pas ? Il faut que je vois avec Jimz avant, ce n'est pas ma nourriture, je ne peux en disposer comme je veux. Tout ce que tu as trouvé est parfait. Je t'en remercie beaucoup. On fait affaires ?

Cette fois ci, il pris ma main avec plus d'entrain et la serra plus fort. C'est un bon début.

Durant les jours suivant, Marat s'occupa bien des cochons. Comme l'organisation de la cuisine se passait bien, j'avais très souvent du temps libre pour pouvoir chercher des ingrédients en forêt et faire des expériences chez moi. Comme les cochons étaient sages et que Marat avait fini l'enclos (il est doué de ses mains ce gamin pour fabriquer et inventer toute sorte d'objets), il venait souvent à la maison. J'ai réussit à aiguiser sa curiosité et je voyais bien qu'il s'interressait à ce que je faisais.

Petite anecote : Un jour, il arriva tout content avec une pierre accrochée à un morceau de tissu et me montra qu'en la lancant, la pierre retombait moins vite avec le tissu. Je vois vraiment pas l'interêt mais lui criai à l'invention du siècle.

- Bonjour Jimz. Avec plaisir mais avant cela vous pouvez accrocher votre manteau ici si vous le désirez.
Comment faire le tour du propriétaire? Je pense lui présenter étage par étage puis nous irons dehors et enfin je lui proposerais une tasse de thé. J'ai bien remarqué qu'il fatiguait lors de la montée quand il m'a présenté à Mourfy. On va y aller tranquillement.

- Nous voici au rez de chaussée qui comprend la cuisine que voici et une salle qui peut faire office de salle à manger ou espace détente. Comme vous le voyez la cuisine est assez grande, je m'en sert poour tester de nouvelles recettes, c'est un peu mon laboratoire. Je lui souris et il me le rendit.
- Passons à l'étage, si vous le voulez bien. Cet étage est bien pratique car il comprend deux chambres et une salle d'eau. J'occupe la chambre près de la salle d'eau ( ce qui est pratique quand on se réveille la nuit) lui dis-je en faisant un clin d'oeil.

- Sinon le dernier étage, qui se trouve être un grenier comporte deux pièces. Je les vois comme une chambre plus son annexe car comme vous le voyez, on entre directement dans la chambre et la porte là-bas mène à la petite pièce. Je ne sais pas trop encore quoi faire de cet étage. Voila pour l'intérieur. Si vous avez des questions..., sinon je vous fait visiter le jardin.

Jimz n'est vraiment pas bavard. Il n'a fait qu'hocher la tête depuis le début. Je me doute qu'il attend d'avoir une vision d'ensemble de la maison pour me questionner mais c'est pas très sympa pour moi, j'ai l'impression de parler seule.


- Nous voici dans le jardin. Il y a beaucoup de travail et je n'ai pas encore eu le temps de commencer. Mais j'ai ma petite idée : je verrai bien quelques arbres fruitiers et une serre là bas pour quelques légumes et des heu ... Des fleurs que j'aime bien qui viennent du sud et qui besoin de plus de chaleur.

Après quelques dizaines de seconde à regarder ce jardin, je proposais :

- Ca vous dit un petit thé ? J'en ai un qui est très fruité et redonne de l'énergie pour la journée.

- Essayer de savoir qui sont mes parents. Et puis ensuite... Et bien, je vous avoue que je ne sais pas trop.

C'est vrai ça j'en sais rien. Depuis tout ce temps, bon nombre de scenarii sont passés dans ma tête. Je ne peux tout de même pas lui dire :

- Ca va dépendre de qui ils sont, s'il sont riches, je reste avec eux sinon je repars.

Il va me prendre pour une folle furieuse s'il savait que j'avais déjà pensé que :

- Dès que je sais qui ils sont, je me fais inviter par eux et je verse délicatement du poison dans leur verre. Non, pas un poisson qui agit rapidement, mais un bien lent et pendant ce temps je leur explique qui je suis et exige explications. Abandonner un bébé est inadmissible, ils mériteront leur sort.

Ca c'est sur que je vais passer pour une folle aussi pour ça :

- Quand je les aurais identifiés, je me présenterrai et je resterai avec eux jusqu'à la fin de mes jours. Ce sont mes parents, je doit vivre avec eux, m'occuper d'eux, les soigner, les guérir. S'ils ont laisser derrière eux un bébé, c'est qu'ils devaient être dans le besoin et je saurais les y en sortir.

Je lui dit réellement :

- Je pense que je verrais ça à ce moment.

Voulant changer de sujet :

- Vous aimez bien ce thé ? J'y ai ajouté un peu de Millepertuis qui calme et détent. Il y a aussi du cassis pour le gout. et pour les rhumatismes. Je pensais que ce mélange à la fois doux et corsé vous plairait.

Ce petit moment m'a permis de me remettre les idées en place afin de lui demander :

- Sinon, à propos de mon médaillon, je sais que cela est incongru mais sauriez vous en savoir plus ? Je me doute que vous avez beaucoup d'autres choses à faire, mais vous pouriez peut être me laisser regarder un ou deux livres (en m'indiquant lesquels). Je chercherais moi-même. Je peux laisser Mourfy aux cuisines avec des consignes claires pendant quelques heures. Il aime de plus en plus son métier.

- Merci pour le compliment. Effectivement, j'étudie les plantes depuis quelques années. Je commence à avoir une base de données assez conséquente que se soit médicinale mais surtout culinaire.
Au sujet de votre proposition, il faut que j'y réfléchisse. Je ne sais pas trop quoi faire pour l'instant, je dois mettre de l'ordre dans mes idées.

Tout en raccompagnant Jimz à la porte :

- Au sujet de la cuisine, cela me va droit au cœur mais Mourfy fait sa part de travail et la fait bien. Il trouve de la motivation. Il ne lui fallait qu'un coup de pouce pour qu'il s'investisse davantage.

J'aime bien lancer. Depuis toute petite, je m'amuse à lancer des petits cailloux sur tout ce qui passe à ma portée : arbre, poteau, autre caillou, ... Ça ne m'a jamais quitté, dès que je peux, je vise et je tire. J'aime ça et je ne me débrouille pas trop mal.

Un soir, alors que je m'amusais à viser un seau de l'autre coté du jardin, une lueur dans le ciel accapara mon attention. Ce n'était pas une lumière ponctuelle comme un coup de canon, non, c'était une lumière diffuse mais sur un petit volume comme si un tout petit soleil se levait. Il n'y avait qu'une seule cause possible à ce phénomène : un feu et vu la taille et la couleur, il n'était pas loin et venait de commencer.

Je suis sortie précipitement sans même avoir pris le temps d'attacher mes chausses. J'ai claqué la porte et me suis dirigée vers l'incendie. Très rapidement, j'ai vu Marat qui courrait à ma rencontre.

- Dex ! Dex !

Nous nous retrouvons au milieu de la rue, Marat est essoufflé, affolé et complètement perdu. Il peine à retrouver son souffle.

- Le feu... Chez moi... Papa ... Bloqué... Une chaine... Du puits... De l'eau... J'ai peur.

Ces derniers mots furent clairs et la détresse se sentait dans ses yeux. Il avait besoin de moi et maintenant. Je vais le garder cette nuit mais avant tout, il fallait que je m'assure de la situation.

- On va chez moi. Il faut que j'aille voir ce qu'il se passe. J'en ai pas pour longtemps. Je revient dans dix minutes. Commence à faire bouillir de l'eau dans la théière pendant ce temps.

- Je ne veux pas que tu me laisses, je ...

- Courage, ca va aller, je vais aller vite. Je te le promet.

- Ok se résigna t'il en baissant la tête.

J'ai couru à toute vitesse vers sa maison. En arrivant, j'ai pu constater l'ampleur des dégâts. Sa maison est ravagée, les flammes ont quasiment disparues mais à travers les fenêtres, je ne vois plus les murs des chambres. En regardant par une fenêtre du dernier étage, on aperçoit le ciel. Étrange impression que cela procure. Le toit a disparu et je vois le ciel à l'intérieur de la maison. Un frisson me parcourt le corps.

Vu les dégâts, le feu a pris rapidement. Heureusement qu'il y avait du monde et qu'ils ont vite réagit, les maisons voisines n'ont pas l'air touché. Seulement quelques traces noires laissées par les flammes sont visibles. Heureusement !

Un homme avec un seau s'approche de moi :

- Il ne faut pas rester là, chef, c'est encore dangereux.

- Je pars de suite, je veux juste savoir si vous avez des nouvelles de l'homme qui vit là ?

- Pas vu, j'ai cru comprendre qu'un homme était bloqué là-haut mais je sais pas qui c'est.

- Merci, quand vous aurez des nouvelles, pourriez vous me les faire parvenir ? Je serais chez moi avec son fils Marat.

Je suis retournée auprès de Marat. Il attendait dans la cuisine, assis sur une chaise, les yeux dans le vide. La théière était renversée, un flaque d'eau à coté et le feu éteins. J'ai ramassé la théière, pris Marrat dans mes bras. Lui demander d'allumer le feu n'était peu être pas une bonne idée.

Il pleura dans mes bras. Je l'accompagna au salon et nous avons attendu presque toute la nuit. Il réussit à s'endormir de fatigue mais son sommeil fût très agité et trop peu réparateur, je le crains.

Lorsqu'il se réveilla, il voulut aller directement voir les dégâts. Je l'ai d'abord obligé à se remplir le ventre. Il ne voulait pas manger, cela se comprend, mais il le fallait. Après ce très court repas, nous sommes retournés voir sa maison. Le feu était maitrisé mais il y avait encore beaucoup d monde qui s'affairait. Un homme (que j'avais déjà vu auparavant mais je ne souvenais plus de qui il était) s'approcha de nous. Il fixait Marat et ses yeux trahissaient la tristesse et l'embarras. C'est le même regard qu'à un médecin qui doit annoncer un décès.

Je n'ai pas écouté ce qu'il a dit à Marat, ma peine pour lui était tellement grande que mon corps entier se bloqua et coupa tout contact avec l'extérieur pendant quelques secondes. Marat s'effondra.

Je me suis mise à côté de lui, le pris dans mes bras et l'ai bercé pendant quelques minutes. Ses pleurs m'ont déchiré le cœur. Je me sentais partagée entre l'apathie et la peur de devenir responsable d'un être. Que vais-je faire de lui ?

Je vis Mourfy au loin, il attrapa mon regard et comprit qu'il serait seul en cuisine aujourd'hui. Il leva son pouce pour me rassurer.

Un temps interminable se passa, Marat se calma et commença à se relever.

- On rentre à la maison ? Je savais très bien qu'utiliser le terme "maison" en parlant de la mienne ne le dérangerait pas, il s'amusait à dire qu'il y était plus souvent que chez lui. C'est sa "deuxième maison".

La journée s'est passée bien tristement, beaucoup de réflexions, beaucoup de silences. La nuit ne fût guère plus agréable. Le lendemain matin, il me dit :

- J'ai bien réfléchit, je veux partir, il faut que je prenne l'air. Je n'ai pas envie de rester aussi près de ... Il n'a pas fini sa phrase.

Mon cerveau se mit à réfléchir à toute allure. Que faire ? Le laisser partir ? L'en empêcher ? Où ira t'il ? Comment vivra t'il ? Ais-je envie de le laisser partir ? Ai-je envie de le quitter ? Parmi toutes ses solutions, toute cette obscurité, une lueur commençait à percer. Il fallait que je vérifie quelque chose avant et je le lui dit.

Une fois rentrée chez moi, je me suis mis à réfléchir. Il faut que je me prépare. Je ne dois rien oublier. Vêtements, nourriture, argent, je n'ai pas de souvenirs alors cela sera toujours ça de moins à porter. Tout tiendra dans une malle. Mon sacs pour les épices et je suis prête.

Quoi d'autre? La maison, ca va aller, je laisse les clés à Mourfi, je ne sais pas quand je vais revenir.

...

Je commençais à m'y attacher à cette maison. Elle était grande, pratique, accueillante et surtout, elle était à moi.

Les cochons, je sais que Mourfy s'en occupera bien. Mourfy ! Ça me fait mal au cœur de le quitter, je m'y suis attachée à ce gros ours râleur.

Dexert regarda la lettre que Jimz lui avait passée. Ce soir, au calme, elle la lira et essaiera d'en trouver des information

Il va falloir que j'aille parler à Mourfy.